Overwatch : Analysons les Héros Féminins

Overwatch : Analysons les Héros Féminins

Overwatch : Analysons les Héros Féminins

On ne présente plus Blizzard Entertainment, le célèbre éditeur de jeux vidéo à succès. Le nombre d'étudiantes stagiaires recrutées a augmenté de +166% en un an pour l'année 2017 ! L’entreprise avoue rechercher ces profils (encore trop rares à leur goût) afin “de diversifier les points de vue dans leurs équipes et créer des jeux pouvant parler au plus grand nombre”. C'est une véritable aubaine pour les jeunes filles voulant se lancer dans l’aventure aux côtés de Blizzard, mais pourquoi cet intérêt de la part de l’éditeur ?

Les joueuses représentent aujourd’hui une part importante du marché du jeu vidéo qui ne cesse d’augmenter chaque année. En France, on compte 40% de joueuses PC et 48% de joueuses consoles. Afin de continuer à attirer ces joueuses, les personnages créés par les éditeurs se doivent de parler aussi bien aux hommes qu’aux femmes. C’est justement tout l’enjeu de créer des équipes de travail mixtes pour monter des projets de développement de jeu et cela, Blizzard semble l’avoir bel et bien compris.

En effet, leur jeu vidéo Overwatch a rassemblé plus de 30 millions de joueurs dans le monde depuis sa sortie. Près de 100 personnes travaillent actuellement sur le jeu dont une quarantaine de développeurs. Cette équipe composée d’hommes et de femmes a su montrer en quoi le changement de stratégie en terme de recrutement a peut-être influencé le développement et la diversité des personnages d’Overwatch.

Et c’est justement le thème que nous allons aborder aujourd’hui ! A sa sortie en mai 2016, le jeu comptait 24 héros que l’on pouvait jouer et nous constations déjà une mixité quasi parfaite (10 personnages masculins, 8 féminins, 2 robots et 1 animal). Cependant, l’éditeur ne s’est pas arrêté là et a doté ses personnages d’histoires aussi diverses que passionnantes. Attardons nous sur les héros féminins d'Overwatch...

Des personnages progressistes ?

On retrouve dans les héros féminins d'Overwatch, des personnages assez emblématiques de l'univers du jeu vidéo comme l'aventurière, l'assassin ou la chasseuse de primes. Ce sont des classiques, ils sont extrêmement exploités depuis des années maintenant. Cependant Blizzard a su tirer son épingle du jeu avec quelques détails qui montrent que oui, ces personnages sont des classiques, mais ils sont dans l'air du temps !

Prenons par exemple Tracer, à savoir le héros "vitrine" d'Overwatch, qui a été annoncée comme étant une aventurière assez "newbie". Son personnage est ouvertement homosexuel comme on peut le voir dans la BD "Reflections" où elle embrasse sa petite amie. Blizzard a même été remercié pour le fait d'offrir une palette de héros aussi diversifiée car cela permet une identification plus personnelle et propre à chacun. De plus, comme nous le savons, Blizzard ne créé pas des personnages au hasard et ils sont même plutôt excellents en "story telling".

Concentrons nous un peu sur les métiers de ces femmes ! Vous le savez, chez Game'Her on prône la mixité sociale dans le monde du gaming mais aussi de façon plus générale, tout comme Blizzard apparemment. On retrouve des métiers encore assez "masculinisés" dans notre société actuelle à travers ces personnages : D.Va (joueuse professionnelle de jeux vidéo), Pharah (responsable de la sécurité), Zarya (soldat), Ange (docteur), Mei (scientifique) ou encore Sombra (hackeuse). Ce choix permet aux joueurs de montrer que le genre d'une personne n'est pas un frein pour pratiquer ces métiers. Bien que des métiers comme celui de scientifique, docteur ou soldat sont de plus en plus démocratisés, certains sont encore sujets aux débats notamment celui de joueuse professionnelle de jeux vidéo comme D.Va. Elle est même devenue le symbole d'une organisation féministe de joueuses de jeux vidéo en Corée du Sud, qui espère voir des personnages comme celui de D.Va émerger dans la société. Geguri, la 1ère joueuse pro d'Overwatch, donne justement un parfait exemple du parcours difficile pour s'insérer dans le domaine professionnel en tant que femme surtout en Corée du Sud.

Même chose concernant les aspects visuels des personnages féminins ! Nous avons des personnages avec des origines ethniques différentes, des physionomies différentes. On avait tendance à critiquer les personnages féminins pas réalistes dans les jeux vidéo, mais que pouvons-nous dire de personnages comme Zarya ou Mei ? Une véritable palette de corps différents, au niveau du physique mais aussi de la personnalité.

« Reflections a révélé que Tracer avait une petite amie, et pas un petit ami comme certains le pensaient. Et cela fait partie de ce que nous souhaitons, dans l’équipe d’Overwatch: les choses normales sont normales. Il est important de montrer les choses normales comme normales, dans le but qu’elles soient normalisées. Beaucoup de gens se sont attendus à ce que d’autres personnages soient peut-être représentatifs de la communauté LGBT. Et qu’il ne s’agissait peut-être pas de Tracer. Pour nous, l’important à propos de Tracer, c’était avant toute chose qu’elle soit une héroïne badass qui voyage dans le temps. […] C’est une différence d’avoir un personnage LGBT sur la jaquette, d’autant plus une femme, alors c’est quelque chose dont nous sommes fiers. »

Jeff Kaplan sur la découverte de l'homosexualité de Tracer

On retrouve également un personnage comme Symmetra qui se révèle être autiste comme l'avait mentionné un fan après avoir lu la BD "A Better World". En effet, le frère du fan était lui aussi atteint d'autisme et cela les avait aidé à renforcer leur relation malgré la maladie dont son frère est victime. Jeff Kaplan s'est réjoui de cette nouvelle et à bel et bien confirmé que le personnage de Symmetra était atteint d'autisme et qu'elle montrait au monde à quel point les personnes atteintes de ce trouble peuvent être extraordinaires. On découvre donc avec Overwatch que l'on peut être atteint d'une maladie (ici l'autisme par exemple) et être également un super héros. Encore une fois, Blizzard montre qu'il voit en chaque joueur des inspirations pour leurs personnages et ce, sans distinction entre chacun.

Symmetra

Un autre personnage quelque peu secondaire d'Overwatch est tout aussi intéressant à analyser ! Il s'agit de Efi Oladele qui n'est autre que la créatrice d'Orisa : cette fillette vit au Nigéria et plus principalement à Numbani (ne cherchez pas, c'est une ville imaginaire). Du haut de ses 11 ans, elle est déjà une génie en robotique et en intelligence artificielle qui lui ont valu d'obtenir la "bourse des génies" par la fondation Adawe.

En soi, on connaît l'histoire d'Orisa si on a suivi l'arrivée des nouveaux héros sur Overwatch mais encore une fois, regardons cela plus en détail. Efi est une jeune fille originaire du Nigéria qui est en quelque sorte une ingénieur en devenir. On sait bel et bien que la parité chez les ingénieurs est loin d'être parfaite et encore moins en terme de diversité culturelle !

Une personnage comme celui d'Efi est parfait pour montrer que l'on peut devenir ingénieur même en étant une femme et en plus venant d'un continent dit "pauvre". Jeff Kaplan regrette lui même que Efi ne soit pas un héros jouable. Bien évidemment, Overwatch est un jeu basé sur une histoire virtuelle et ne reflète pas la réalité de nos sociétés. Cependant, on peut bel et bien voir des messages destinés aux joueurs et cela Blizzard a su s'en servir intelligemment pour construire ses personnages.

Des codes encore trop genrés ?

Dès le lancement du jeu, certains personnages féminins ont été critiqués pour leurs images/poses sexualisées qui ont suscité la colère de certains fans de Blizzard.

C'est notamment le cas de Tracer qui avait une pose jugée sexiste. En effet, la "victory pose" nommée "Over The Shoulder" de la jeune héroïne a été tout simplement censurée par Blizzard après la polémique qu'elle a suscité.

Plusieurs fans s'étaient plaints sur les réseaux sociaux, notamment sur le site de Battle.net, où un utilisateur du nom de "Flipps" avait mentionné le fait que Tracer "était une tueuse d'élite rapide" et que cette pose la réduisait à une image de "personnage sex-symbol" alors que ce n'est justement pas du tout l'image qu'elle renvoie dans le jeu.

Blizzard, ayant bien compris la leçon, a aussitôt agi en conséquence suite à cette polémique en donnant raison à ce fameux "Flipps". Les joueurs ont félicité cette décision montrant qu'il prenait bien en compte les retours des joueurs et qu'il était engagé dans le combat contre l'hypersexualisation des personnages féminins dans le monde vidéoludique.

La Victory Pose : Over The Shoulder

On découvre également une véritable volonté de la part des joueurs de se projeter à travers des "personnages identifiables" pour eux. C'est justement ce dialogue possible entre les éditeurs de jeux et les joueurs qui permet de réfléchir sur la création de personnages et de ce qu'attendent les joueurs. On a aujourd'hui des phases de construction plus complexes qu'avant en terme de morphologie, de psychologie également pour ouvrir une expérience agréable aux personnes jouant aux jeux vidéo.

Lorsque l'on regarde les topics sur les personnages féminins d'Overwatch sur Reddit, on s'aperçoit qu'ils sont en majorité acceptés par la communauté. Plusieurs facteurs sont pris en compte par les joueurs concernant les morphologies des personnages : leurs origines, leurs métiers etc. Chaque personnage d'Overwatch est un héros, beaucoup comprennent la nécessité d'avoir des bodytypes de personne en bonne santé et endurant. Les joueuses apprécient l'initiative de Blizzard de montrer justement différents corps féminins à travers ce jeu et de ne pas se cantonner à un archétype dépassé depuis longtemps.

« J'aime à penser que nous avons fait du bon boulot pour représenter des femmes fortes avec nos personnages. Aucune de nos histoires pour les personnages féminins sont à propos de princesse attendant dans un château d'être sauvée. Les femmes de nos jeux sont celles qui viennent vous sauver. Elles font parties des personnages les plus forts que nous avons. Elles ne sont pas des victimes, (...) elles n'attendent pas d'être sauvées par un homme. Ce sont des héros au sens propre du terme. »

Jeff Kaplan sur les personnages féminins d'Overwatch

Le storytelling qui fait la différence

On remarque que le physique des personnages féminins doit être en adéquation avec l'histoire du personnage comme nous venons de le voir pour Tracer. Cependant, le physique peut être contrebalancé par des histoires valorisantes pour les personnages "sexualisés". C'est bel et bien le cas du personnage Fatale (Widowmaker en anglais) qui est justement un exemple parfait. En effet, elle est l'un des seul personnage critiqué pour son côté jugé "trop sexy" parmi les personnages féminins d'Overwatch. Mais pourtant, elle est relativement bien acceptée par l'intégralité de la communauté Overwatch. Pourquoi une telle différence de traitement entre Fatale et Tracer ?

Le storytelling autour de Fatale est très bien construit et travaillé ! Lorsque l'on s'intéresse de plus près à sa véritable histoire, on se rend compte que sa morphologie est en accord avec son passé. En effet, Amélie (le véritable prénom de Fatale) était une ballerine talentueuse avant de se marier avec Gérald Lacroix, un agent d'Overwatch. C'est donc tout naturellement que son corps soit en adéquation avec son ancienne profession d'où ses longues jambes, son buste fin, une poitrine pas trop opulente etc. Chaque détail compte et ne semble ne pas avoir été choisi au hasard pour caractériser son personnage d'assassin dans le jeu. Sa transformation par la Griffe après son enlèvement est également une réponse a bien des questions que l'on peut se poser sur son corps (couleur de sa peau, vision etc).

Fatale

On pourrait également faire une analyse similaire avec le personnage de Lara Croft, véritable icône du jeu vidéo qui est également très appréciée des joueuses. Son histoire valorisante sur le plan moral ou psychologique permet de faire abstraction des traits sexualisés de son corps (bien que notre Lara internationale ait beaucoup changé physiquement depuis ses débuts...) et c'est justement ces qualités là que les joueuses apprécient dans ce personnage.

Pour le coup, nous ne pouvons que féliciter Blizzard pour son gros travail sur les personnages féminins qu'il a créé tout au long des années notamment dans leurs autres jeux : World of Warcraft, Diablo ou encore Starcraft.

Pour finir...

Bien évidemment, le monde d'Overwatch est si riche et passionnant qu'il mériterait encore bon nombre d'articles ! En effet, le jeu peut nous cacher encore bien des messages à travers ses personnages, ses cartes ou ses bandes-dessinées ! De nouveaux personnages seront dévoilés par la suite et on peut être sûr que Blizzard nous réserve d'autres surprises.

C'est d'ailleurs pour tout ce que je viens de citer dans cet article que beaucoup de joueuses ont accueilli Overwatch avec joie. Les joueuses sont deux fois plus nombreuses sur ce jeu que sur d'autres jeux FPS et c'est notamment grâce à sa palette de personnages féminins qu'il a autant séduit ce public de plus en plus convoité aujourd'hui.

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